Comment le projet mémoire collective a été mis en oeuvre ? quelles ont été les différentes étapes? Quelles ressources ont été mobilisées? Qu'est-ce qui s'est bien passé? quelles difficultés ont été rencontrées ? Quelles apprentissages pour les porteuses du projet ? Quelles pistes à continuer de creuser à l'issue de l'expérience?
Cet article vous embarque dans les coulisses du projet mémoire collective !
Au départ du projet
Il y a le souhait pour PiNG et Les Portes Logiques d’expérimenter des voies de transmission des savoirs à l’oral, au sujet de "ce qui se passe" dans nos lieux; et de constituer une première brique de “mémoire collective” des ateliers de PiNG (par et pour les gens qui le fréquentent). Ce projet est aussi l'occasion de créer des ressources thématiques, méthodologiques et réflexives pour PiNG, sa communauté... et aussi d’autres tiers-lieux, comme celui des Portes Logiques à Quimper, à propos des sujets qui traversent nos structures, nos lieux et nos équipes au quotidien.
Les intérêts identifiés dans la conception du projet pour toutes les parties prenantes directes et indirectes
Pour les lieux animés par PiNG et "la communauté" qui les fréquentent, il s'agit de constituer une première brique de mémoire collective / archive sonore de la vie du lieu, accessible à tous⋅tes les membres. Cette documentation de l'expérience individuelle des lieux produit un commun collectif, à partir duquel il est possible de construire du sens, une histoire, des valeurs, qui se transmettent "dans le lieu" et "hors- lieu".
Sur ce point, il s'agit vraiment d'aller vers une posture de tiers-lieu apprenant .
Recueillir la parole des personnes "témoins" participe également d'une démarche de reconnaissance collective (de PiNG, comme d'autres personnes) de leur expérience, "expertise" du lieu et de la singularité de leur "apport" aux autres et aux lieux.
Pour l'équipe de PiNG, cette action permet à la fois de confronter notre vision "porteur de projet" de ce qu'est le lieu, comment il est vécu, avec la vision partagée par les personnes qui les fréquentent. Ce travail vient ainsi nourrir, peut-être confirmer ou infirmer, des hypothèses et des perceptions relatives à la vie de nos lieux, à la façon de les animer, et aux rapports aux savoirs / aux techniques, qui s'y (dé)construisent.
Pour les personnes "témoins", il s'agit de partager et transmettre son expérience, auprès des autres membres de PiNG en premier lieu; par l'intermédiaire de Laure des Portes Logiques.
Laure représente également une autre communauté, celle des Portes Logiques, et de "la Baleine", un atelier partagé où l'association organise (entre autres!) un opentalier, à Quimper.
Et qui sait, en formulant sa pensée ou à l'écoute de son propre témoignage ou de celui d'une autre personne, l'expérience aura peut-être un effet "conscientisateur" sur les apprentissages réalisés, la richesse de son parcours au sein des ateliers, des questionnements qui mériteraient d'entamer des discussions ça et là... la liste est non exhaustive sur ce point!
Pour les Portes logiques il s'agit de mettre en oeuvre une démarche de constitution de fonds d'archives sonores en lien avec la culture numérique et le réseau des lieux de pratiques. Cela permet à l'association et son lieu de se positionner au sein de l'écosystème à la fois comme ressource sur ce sujet et bénéficiaire de l'expérience d'un autre tiers lieu.
Pour d'autres tiers-lieux en France il s'agit de prendre connaissance des expériences de la communauté des lieux de PiNG pour faire émerger et/ou nourrir la réflexivité sur son propre lieu et sa communauté. Il s'agit aussi de disposer d'un "kit" de base et d'une expérimentation à remixer au sein de sa communauté en s'inspirant de la démarche et des outils mobilisés et partagés dans le cadre de ce projet. Vers une mémoire sonore "distribuée" des lieux ? des échos, résonnances, dans les mémoires partagées entre les territoires et les communautés ?
Le planning de réalisation du projet
Ce projet a été mené sur 10 mois, de mars à décembre 2021.
Voici un aperçu visuel de son déroulement :
Les ressources mobilisées
Les ressources humaines
- 2 porteuses de projet : Maëlle Vimont-Broch côté PiNG, et Laure Bouscasse côté Les Portes logiques
- 7 personnes témoins (3 salarié⋅es de PiNG, 2 membres de l'association, 2 partenaires historiques de PiNG), qui ont donné chacun⋅e environ 2h de leur temps pour partager leur témoignage. Cela représente plus de 15h d'entretiens en cumulé !
- 2 complices de l'équipe salariée de PiNG qui ont prêté main forte sur la valorisation du projet et la création des ressources : Orane (chargée de communication) et Meven (chargé de projets, en charge de la question des ressources au sein de l'équipe de PiNG)
Les ressources financières
Le projet a pu voir le jour grâce à une ligne de financement dédiée dans le financement plus global "Fabrique de territoire" relatif aux lieux de PiNG et à la création de ressources sur le territoire pour les tiers-lieux. Ce financement a permis de prendre en charge le temps de travail des porteuses de projet, valorisé à hauteur de 8000€ environ.
Le matériel d'enregistrement et les infrastructures nécessaires à la diffusion des ressourecs étant déjà en place chez PiNG et Les portes logiques, le projet n'a pas nécessité un investissement en matériel ou en développement web.
Les ressources techniques et méthodologiques
Nous avons écrit un article complet sur le sujet ! Visitez la page "Kit de mise en oeuvre" pour en savoir plus sur ce point.
Les "pépites" et les "cailloux" sur le chemin
Bilan à chaud du point de vue des 2 co-porteuses de projet, Laure et Maëlle
Nos pépites (réussites et réalisations marquantes) :
- les rencontres et les échanges riches et authentiques tout au long du projet
- la confiance accordée par les personnes témoins pour le projet
- une première pierre à l'édifice d'une mémoire collective sonore chez PiNG
- réunir des membres de l'asso, des partenaires et des salarié⋅es, autour d'une production commune dans une démarche d'éducation populaire et de "conscientisation" pédagogique
- la collaboration fluide et créative entre PiNG et Les Portes Logiques
- les discussions et les questions soulevées lors de la première écoute avec les personnes témoins présentes à l'OPENatelier le 07 octobre
- la proposition de Laurent d'illustrer le projet par des photos, la séance photo réalisée et les photographies qui y en sont sorties !
Nos cailloux (difficultés rencontrées et moyens mobilisés pour y remédier) :
- Mobiliser les personnes et trouver "le bon moment" pour réaliser l'entretien dans de bonnes conditions; patience et bienveillance de rigueur !
- Accepter le fait de ne pas pouvoir tirer tous les fils thématiques qui se dégagent des témoignages: de la matière pour plusieurs années !
- Trouver les bons formats pour restituer la démarche auprès des participant⋅es et auprès des tiers-lieux: avancer à tâtons, réfléchir dans et sur l'action à chaque étape, et accepter l'imperfection comme une première marche dans une intention plus large !
Qu'avons-nous appris en menant le projet ?
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Nous avons appris à faire des choix, renoncer à l'exaustivité et parfois "bifurquer" concernant la meilleure façon de restituer cette expérience.
En effet, les expériences individuelles récoltées dans ces entretiens sont trèèèèèès riches et les points de vue totalement pluriels sur chaque sujet abordés...si bien que la volonté de départ d'en extraire des capsules sonores thématiques s'est avérée pour la plupart des sujets compliquées, car cela aurait nécessité un montage qui n'aurait pas permis de conserver "le fil des pensées". Aussi nous avons décidé d'ajuster la forme de la restitution aux matériaux sonores récoltés.
En ce sens, nous affirmons davantage à l'issue de ce projet, sur le fond comme sur la forme de la restitution, que ce sont des témoignages "situés" (dans le temps, dans l'espace, relatifs à des expériences et des points de vue individuels sur différents sujets qui s'entremêlent); ce qui semble par ailleurs très cohérent avec des éléments constitutifs de la culture de nos lieux: chacun⋅e apporte SA contribution, il n'existe pas UNE pensée uniforme sur les sujets qui traversent nos lieux. -
Nous avons appris qu'au delà des sujets préalablement balisés, d'autres sujets émergent dans les discussions (historique subjectif de la vie de l'association PiNG, féminisme et numérique...), qui seraient tout autant intéressants à explorer !
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En prolongement ,nous avons appris que cette "matière sonore" faite d'expériences et de points de vue individuels à un instant T pourrait être analysée sous beaucoup d'angles et retravaillée dans de multiples contextes (vie de l'association, pratiques de recherche, de transmission, pratiques artistiques...)
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Nous avons appris que les effets qu'on projette dans un projet de ce type ne se passent pas toujours là où les attend ou comme on les attend.
En effet, nous souhaitions, par la discussion pendant l'entretien, déclencher un effet "conscientisateur" sur la question des apprentissages et des transmissions informelles dans les ateliers, pour le dire vite, un effet "wahou mais je sais plein de choses et je transmets plein de choses de façon informelle!"
Or, nous avons l'impression que cela ne s'est pas tant passé pendant les entretiens... qu'à l'étape de la première écoute.
Nous émettons ainsi l'hypothèse qu'écouter son propre récit et écouter le témoignage d'autres personnes nous permettrait de réaliser davantage, par exemple, qu'on se questionne sur les mêmes sujets que d'autres personnes, qu'on "fait du chemin" sur un sujet (= on a appris des choses, on a transmis des choses...et on continuera de le faire), que chacun⋅e a un point de vue singulier et que celui-ci est légitime (nous avons des points de vue différents entre salarié⋅es, membres ou partenaires qui gravitent autour d'un lieu, et chaque point de vue est légitime) et qu'il est en mouvement (ce que je pense aujourd'hui va évoluer dans le temps, mon point de vue évolue au fil de mes expériences)...
En complément nous émettons également l'hypothèse que cette démarche de conscientisation pourrait acquérir une dimension collective (nous avons conscience, ensemble que...) lors de discussions en groupe, après une session d'écoute individuelle.
4 pistes à creuser à l'issue de l'expérience
4 idées pour le futur de la mémoire collective au sein de PiNG (et ailleurs!) :
- créer un jukebox numérique et physique dans les lieux pour écouter des courts extraits des témoignages, de façon aléatoire...comme des bribes de mémoire partagés et accessibles sur un sujet donné?
- poursuivre le travail de création de mémoire collective: vers un studio d'enregistrement dans les ateliers ?
- développer les approches féministes et queer des espaces du "faire" : quelles dynamiques systémiques à l'oeuvre dans nos ateliers et comment dépasser, notamment, le syndrome de l'imposteur⋅ice dans la pratique technique quand on est une femme ou une personne queer ou une personne noire, ou une personne handicapée qui fréquente un atelier entouré d'hommes hétéros cisgenres blancs CSP+ valides ?
- faire vivre la mémoire, déconstruire nos pratiques (d'animation notamment) et mener des démarches de conscientisation sur des sujets clés (apprentissage / transmission, émancipation individuelle et collective, thématiques liées aux genres et aux minorités cf point précédent) en organisant des cercles d'écoute et de discussion ?
Passage de relais
Et maintenant, nous invitons quiconque est intéressé⋅e pour reproduire ou s'inspirer de la démarche, de se saisir et remixer les ressources partagées sur ce site ressources pour son propre usage... et (encore mieux!) de partager à son tour des ressources permettant d'enrichir la création, la diffusion et le partage des mémoires de nos lieux !
Alors... À qui le tour ?
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